Clap de fin, en douceur ou dans la douleur ?

Sur les traces de son père, Ruby finit par se retrouver à nouveau seule au cœur de cette apocalypse. La voilà donc à attendre, en vain, que les jours passent, que les choses s’améliorent, mais aussi que son père, ultime espoir de famille pour elle, arrive. Ruby vit des jours très difficiles, qu’elle nous raconte avec sarcasme et parfois en se plaignant à la manière d’une adolescente. Mais nous pouvons la comprendre, après tout, les douches sont de l’histoire ancienne et à part boire du coca, elle n’a pas grand espoir. Perdue dans le temps et sans électricité, chaque jour qui s’achève est, pour la survivante, un combat remporté. Si la jeune fille s’enlise, elle ne perd pas forcément espoir. En revanche, ses tentatives d’aller de l’avant s’avèrent foireuses et elle collectionne les mauvaises rencontres. Décidée, elle quitte le morne quotidien pour essayer de retrouver son père à qui elle laisse un mot à son tour. Sa compagne de route n’est pas la personne qu’elle aime le plus, mais bon par temps apocalyptique, on fait avec ce qui vient, n’est-ce pas ? C’est lors de son passage à l’armée que Ruby va comprendre bien des choses. Trop même pour une jeune fille qui a tendance à n’en faire qu’à sa tête et fuir. Loin. Après tout, n’a-t-elle pas raison ? Et si ce désastre planétaire pouvait être encore pire ?

Dans ce tome, nous sommes conduits au dénouement et c’est malheureusement la façon dont nous y arrivons qui ne m’a pas totalement convaincue. Je m’attendais à beaucoup de choses, et à vrai dire, du mouvement nous en aurons, justement dosé à côté de l’inertie bien naturelle par temps ravageur. Mais Ruby, qui pourtant, semblait grandir au fil du premier tome, ne montrera pas beaucoup sa maturité ici. Bien entendu, elle n’a que 16 ans et c’est tout à fait normal de la voir prendre les mauvaises décisions. Seul souci, son caractère impulsif et têtu qui aura tendance à nous faire tourner autour du pot et fait qu’on a l’impression que certains chapitres, scènes du quotidien, ne sont là que pour épaissir l’ultime volet. Pour autant, on ne s’ennuie pas vraiment et nous retrouvons avec plaisir les personnages attachants que sont La Princesse et Le Spratt. Une amorce de sentiments se soulevait dans le tome 1 et nous irons sur la continuité de cette histoire.

Niveau style, on reste totalement cohérent avec le premier et avec ce qui en faisait la force : nous lisons un journal des évènements écrit par une adolescente bien classique. D’où le manque de maturité ou le sens des priorités. Pourtant, Ruby ne fait pas tout de travers, mais l’instinct de survie domine et nous comprenons qu’au fond, tout cela cache les atrocités qu’elle voit au quotidien, mais aussi la perte de sa propre famille et de tous ses amis. Elle nous fait quelques rappels, nous parle de son passé et elle prend encore plus forme sous nos yeux. Et parfois, le tout n’est pas si cohérent avec ses actions. Encore une fois… je ne voudrais pas être à sa place. C’est vrai, que feriez-vous, vous, seul chez vous, enfermé par sécurité avec votre famille en décomposition à l’étage ? Moi, je ne sais pas trop et si je suis un peu dure avec Ruby c’est sans doute parce que bien que plus âgée qu’elle, je ne suis pas certaine de pouvoir trouver les bonnes réponses, les bonnes actions. L’eau est partout, contamine tout. Et cerise sur le gâteau, les humains sont prêts à se battre pour leur survie, quitte à anéantir leur prochain. Fantastique tableau social, n’est-il pas ?

Le roman est plein de messages discrets, mais efficaces et amène forcément à se mettre à la place de la jeune fille ou pourquoi pas à celle de ses différentes rencontres sur l’épuisant chemin qui l’attend. Les épreuves sont nombreuses, plus encore que les erreurs, et le jugement est obscurci par un corps en souffrance depuis bien trop longtemps. Mal alimentée et déshydratée, non soignée pour de multiples blessures, nous comprenons vite que notre apprentie survivante a très mauvaise mine. Pire, elle fait peine à voir. Pire encore (souvenez-vous, cela pourra toujours être pire), elle va se confronter à son ami incongru dans un état qui ferait pitié très rapidement. L’intrusion de l’armée dans le roman n’est absolument pas une surprise, mais ce n’est pas un défaut. En effet, il est dans la nature même des récits apocalyptiques que de faire intervenir l’armée avec des actions qu’on ne cautionne pas nécessairement. Ruby va se retrouver face à certains dilemmes et ses réactions pourront tout aussi bien nous surprendre que nous laisser perplexes. Mais j’avoue que ce qu’elle voit sur place est déconcertant, terrible même, et que je comprendre alors sa tendance à fuir.

Dernier point et cette fois-ci celui qui m’a le plus agacé, le plus fait serré les dents : la facilité de la solution au problème apocalyptique. La source de ce miracle. Qui, bam, vous est exposé en quelques lignes et tenez-le pour acquis. Je n’ai pas aimé ce traitement. Trop attendu, trop cliché. Il n’est pas mauvais, juste trop évident et trop rapide, façon « allez hop on remballe ». Non, cela ne m’a pas plu, mais il fallait bien de toute façon trouver une issue à ce roman et tenter de lui donner une fin. Ne vous réjouissez pas trop vite, même si LA clé est trouvée, le monde ne va pas ressusciter, les gens ne vont pas subitement cesser de mourir. Non, nous sommes dans quelque chose de terriblement et cruellement réaliste, soyez prêts à voir des êtres humains dépourvus pourtant d’humanité agir dans leur seul intérêt quitte à tout anéantir. Réalisme percutant certes, mais aussi jolie leçon de vie. D’ailleurs, les ultimes lignes de l’ouvrage viennent donner un regard nouveau sur Ruby et sur l’avenir, tout en laissant planer le doute sur l’avenir. Carpe Diem ? Oui, mais si l’on peut danser sous la pluie !

Un second tome qui vient conclure correctement la série, mais qui n’est malheureusement pas à la hauteur du premier livre. Quelques facilités, redondances ou évidences viennent ternir un peu le plaisir, mais heureusement nos personnages sont plutôt intéressants et sympathiques. De lourdes épreuves pour Ruby, des erreurs et un dénouement un peu trop vite expédié… Je reste malgré tout satisfaire de ma lecture qui s’inscrit bien dans la lignée du premier opus.

Un petit manque de quelque chose et voilà une légère déception. Même si je reste heureuse d’avoir lu ce second tome, je m’attendais à un peu plus de complexité. Ruby est toujours la reine du sarcasme dans le corps d’une adolescente à tendance superficielle et nous prenons plaisir à suivre ses aventures, découvertes et coups de cœur… Mais nous passons un bon moment (enfin façon de parler, c’est l’apocalypse et y a des cadavres partout hein).

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